L’État vole au secours de Vale Inco

Publié le par Le MJKF

lu dans les nouvelles calédoniennes

Le haussariat a attaqué, encore une fois, la taxe provinciale sur le tuyau de rejets de l’usine du Sud, hier au tribunal administratif. La justice devrait lui donner tort.

Question à un milliard (1) : Pourquoi l’État s’obstine-t-il à défendre les intérêts financiers de Vale Inco (ex-Goro Nickel), au détriment de ceux de la province Sud ? La réponse se trouve quelque part au haussariat, ou dans un ministère de la République. Officiellement, « il n’y a pas de raison particulière » (2).
Cette version, personne n’y croit vraiment. D’autant qu’hier, le haussariat a contesté la légalité de la taxe sur le tuyau de l’usine du Sud pour la troisième fois en un an, s’associant une nouvelle fois à un recours de l’industriel.
Pourtant, le dossier ne concerne pas directement l’Etat, qui intervient au titre du contrôle de légalité. Il peut exercer ce contrôle sur toutes les décisions des collectivités locales. Mais dans les faits, il n’avait jamais attaqué un acte provincial avant cette histoire de taxe. Rappel. En janvier 2008, le président de la province, Philippe Gomès, accordait à l’industriel le droit d’occuper le domaine public maritime afin de poser son tuyau de rejets en mer, comme cela était prévu de longue date. Pour « valoriser » cette utilisation, la province assortissait le permis d’une redevance fixée à 1 % du chiffre d’affaires de l’entreprise.
Immédiatement, le haut-commissariat a attaqué la taxe, sans succès dans un premier temps. En mars 2008, le tribunal administratif confirmait le bien-fondé de la redevance, estimant qu’il était du devoir des politiques de « veiller à la meilleure exploitation possible du domaine public ». En clair, de ne pas le brader. Et puisque le tuyau est indissociable du fonctionnement d’une usine rentable, la taxe n’était pas « excessive par rapport aux avantages procurés », contrairement à ce qu’avançait l’Etat.

« Curieusement, les requérants poursuivent dans leurs conclusions initiales »

Malgré un jugement défavorable, le haussariat s’est montré solidaire envers Goro Nickel une deuxième fois, en accompagnant le pourvoi de l’industriel en appel. L’an dernier, les juges parisiens ont fini par annuler la taxe, au motif qu’elle se basait sur une grille tarifaire imprécise. Ce n’est pas la redevance qui était remise en cause, mais son mode de calcul. Au passage, la cour administrative d’appel avait annulé tout le permis, ce qui a eu un effet boomerang en gelant le chantier. Quelques semaines plus tard, un nouveau permis paraissait avec une taxe du même montant, cette fois calculée dans les règles.
C’est cette dernière version qui était attaquée au tribunal administratif, hier. Pas tout l’arrêté, seulement l’article concernant la redevance (la leçon de Paris a visiblement servi). « Curieusement, les requérants poursuivent dans leurs conclusions initiales », s’est étonné le rapporteur public, Jean-Paul Briseul, qui livre son analyse juridique aux juges avant leur décision. Il a conclu au rejet des demandes de l’Etat et de l’industriel.
La décision finale sera connue dans deux semaines. Nul doute que les juristes de l’Etat se doutaient que leur démarche était quasiment perdue d’avance. Si les juges confirment le rejet, il restera à Vale Inco à tenter un nouvel appel, tout aussi incertain.
À moins que la nouvelle majorité provinciale, qui s’est prononcée fermement contre cette taxe, renonce à ce milliard de francs annuel. Sans raison particulière. Officiellement.

(1) Le montant annuel que rapporterait la taxe à la province Sud est estimé entre 800 millions de francs et un milliard.
(2) Les Nouvelles calédoniennes du 26 janvier 2009.

 

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